Financement des startups en Turquie : l'utilisation stratégique des obligations convertibles (ODC)
I. Introduction
Pour les startups turques cherchant à obtenir un financement de démarrage, l'obligation convertible constitue une solution de financement originale, bien que peu répandue. Connue en Turquie sous le nom de Paya Dönüştürülebilir Tahvil (PDT), cet instrument fournit initialement des capitaux sous forme de prêt, qui peut ensuite être échangé contre des actions de la société à un moment ou un événement futur prédéterminé. Cet instrument peut être particulièrement avantageux pour les startups turques en quête d'investissement tout en souhaitant reporter l'évaluation définitive de leur entreprise ou les complexités immédiates de la distribution des capitaux propres, souvent liées à la vente directe d'actions en phase de démarrage.
La décision d'utiliser des obligations convertibles en Turquie va au-delà d'un simple accord entre une start-up et ses investisseurs. Ces instruments sont officiellement reconnus par la législation turque sur les marchés de capitaux et sont soumis au contrôle de l'Autorité des marchés financiers. Conseil des marchés des capitaux (CMB, souvent désignée par son acronyme turc, SPK). Il est essentiel que les créateurs d'entreprise et les investisseurs en Turquie qui envisagent ce mécanisme soient conscients que le cadre réglementaire d'émission de ces obligations diffère selon qu'il s'agit d'une société privée ou d'une entité cotée en bourse. Pour réussir cette option, il est essentiel de bien comprendre les exigences légales spécifiques.
Les principales réglementations sont détaillées dans le Communiqué de la CMB sur les titres de créance (Communiqué n° VII-128.8). La compréhension des stipulations de ce communiqué, ainsi que des dispositions pertinentes du Code de commerce turc régissant les procédures des entreprises, constitue une base essentielle pour les fondateurs, les entrepreneurs et les investisseurs. Cette connaissance est essentielle pour structurer des obligations convertibles en toute conformité et leur permettre de soutenir véritablement le développement et les objectifs à long terme d'une startup dans le contexte commercial turc.
II. Le cadre réglementaire : les obligations convertibles selon le communiqué du Conseil des marchés financiers
Le principal règlement constituant le cadre juridique de l'émission d'obligations convertibles en Turquie, le communiqué n° VII-128.8, définit le statut juridique des obligations convertibles en tant qu'instruments du marché des capitaux et énonce les principes régissant leur émission et leur gestion.
a. Les obligations convertibles en tant qu'instruments réglementés du marché des capitaux
Dans le système juridique turc, les obligations convertibles ne sont pas considérées comme de simples contrats de prêt assortis d'une option d'achat d'actions ; elles sont formellement désignées comme des instruments du marché des capitaux. Le communiqué n° VII-128.8 définit spécifiquement une obligation convertible comme un titre de créance conférant à son détenteur le droit de la convertir en actions de la société émettrice. Cette conversion peut être réalisée soit par souscription d'actions nouvellement émises, généralement dans le cadre d'une augmentation de capital, soit par l'acquisition d'actions existantes détenues par la société ou ses actionnaires, selon des conditions clairement définies dans les documents d'émission initiaux.
Cette définition souligne la double nature de la position du détenteur d'obligations : il est initialement créancier de la société, ayant droit au remboursement du principal et des intérêts convenus. En exerçant son droit de conversion, il devient actionnaire. Les obligations convertibles relevant des instruments du marché des capitaux, leur émission et leur négociation ultérieure (le cas échéant) sont soumises à la supervision directe et aux règles de la CMB, garantissant ainsi une approche standardisée et réglementée.
b. Principes fondamentaux régissant les obligations convertibles
Les principales règles et conditions qui définissent la structure et l'utilisation des obligations convertibles comprennent la durée de maturité et le moment de la conversion. Une obligation convertible doit avoir une maturité minimale de 365 jours. De plus, en règle générale, le droit de conversion de l'obligation en actions ne peut être exercé dans les 365 jours suivant la date d'échéance. Ces dispositions positionnent les obligations convertibles comme un instrument de financement à moyen et long terme plutôt qu'un outil de financement à court terme.
Les mécanismes d'évaluation et le traitement des intérêts lors de la conversion sont également clairement abordés. La valeur nominale de l'obligation convertible sert de base pour déterminer le nombre d'actions que l'investisseur recevra lorsqu'il décidera de la convertir.
Concernant les intérêts courus, le communiqué n° VII-128.8 précise que tout intérêt accumulé jusqu'à la date effective de conversion doit être versé en espèces au porteur de l'obligation. Toutefois, si les conditions d'émission le permettent, les intérêts qui auraient couru à la date de conversion peuvent être ajoutés à la valeur nominale de l'obligation et convertis en actions. Détail pratique important : tous les coûts liés à la conversion des actions sont à la charge de la société émettrice.
Les investisseurs conservent des droits et des choix clairs, notamment à l'échéance. Si un détenteur d'obligations choisit de ne pas exercer son droit de conversion avant l'échéance, ou si les conditions de conversion convenues ne sont pas remplies, il a simplement droit au remboursement du principal majoré des intérêts courus, comme pour une obligation standard. Une fois que l'émetteur a rempli toutes ses obligations et que la fenêtre de conversion est close, tous les droits de conversion non exercés deviennent automatiquement caducs.
La priorité accordée aux droits de conversion constitue une protection essentielle pour les obligataires. Lors de la conversion, les nouvelles actions leur sont attribuées prioritairement sur tout droit préférentiel de souscription dont pourraient bénéficier les actionnaires existants en vertu du Code de commerce turc, garantissant ainsi l'accès des obligataires aux capitaux propres.
c. Voies d'émission
Les obligations convertibles peuvent, en principe, être émises au public par voie d'offre publique, ou de manière non publique, par (i) un placement privé ou (ii) une vente à des investisseurs qualifiés. Cependant, les conditions d'une offre publique d'obligations convertibles sont très strictes. Par exemple, les actions de la société émettrice doivent être déjà cotées en bourse, la société doit opérer sous le régime du capital social (autorisé) et ses statuts doivent autoriser explicitement le conseil d'administration à restreindre le droit préférentiel de souscription des actionnaires existants afin de faciliter l'attribution d'actions aux obligataires.
Ces conditions préalables signifient qu'une start-up turque non cotée ne peut généralement pas lancer d'offre publique d'obligations convertibles. Par conséquent, les start-up sont généralement contraintes d'émettre ces instruments sans appel public à l'épargne, le plus souvent par le biais d'un placement privé auprès d'un groupe défini d'investisseurs.
d. L'approche adaptative du Conseil des marchés financiers pour les émissions non publiques
Reconnaissant que les règles standard applicables aux obligations convertibles peuvent parfois s'avérer trop rigides pour les besoins spécifiques des transactions négociées de gré à gré ou des offres internationales, le Communiqué n° VII-128.8, notamment dans son article 23, accorde une certaine flexibilité à la CMB. Pour les émissions nationales qui ne sont pas réalisées par appel public à l'épargne (comme les placements privés auprès d'investisseurs qualifiés) et pour les émissions internationales, la CMB est habilitée à approuver des conditions différentes des dispositions standard du présent Communiqué.
Ce pouvoir discrétionnaire peut s'avérer très important pour les startups turques. Par exemple, la CMB peut autoriser une période de conversion plus courte que le minimum standard d'un an si l'émetteur fournit une justification convaincante et si l'offre est structurée de manière appropriée. Cette possibilité de solliciter l'approbation de conditions personnalisées au cas par cas permet des solutions de financement plus adaptables, tout en restant toujours soumise à l'évaluation et à l'approbation de la CMB, garantissant ainsi la protection des investisseurs et l'intégrité du marché.
III. Conditions d'émission des obligations convertibles
Pour les entreprises turques privées start-upL'émission d'obligations convertibles implique le respect d'un ensemble de règles spécifiques conçues pour les offres réalisées « sans appel public à l'épargne ». Cette voie, bien que distincte des exigences des sociétés cotées, dispose de son propre cadre, conformément au communiqué n° VII-128.8, afin de garantir la protection des investisseurs et le bon ordre du marché. Plusieurs conditions clés déterminent l'accès des startups à ce mode de financement.
a. Profil de l'investisseur et paramètres de l'offre
Lors de l’émission d’obligations convertibles sans offre publique, un élément primordial à prendre en compte est le profil des investisseurs visés et la structure globale de la vente.
En règle générale, ces émissions par les startups privées turques doivent être destinées exclusivement à des « investisseurs qualifiés », ou structurées sous forme de placement privé où chaque unité obligataire atteint une valeur minimale spécifique. Les investisseurs qualifiés sont définis par la CMB et comprennent généralement des entités institutionnelles telles que des banques, des sociétés de courtage, des sociétés de gestion de portefeuille et des fonds de capital-risque. Certaines personnes disposant d'un patrimoine net élevé ou d'une expérience professionnelle pertinente peuvent également entrer dans cette catégorie.
Si l'offre est destinée à des investisseurs ne répondant pas aux critères formels d'« investisseur qualifié », le communiqué n° VII-128.8 stipule que chaque unité d'obligation convertible doit avoir une valeur nominale minimale de 100,000 XNUMX TL. Ce minimum substantiel vise à garantir que ces placements privés soient réservés à des investisseurs capables de réaliser des investissements individuels plus importants et ne soient pas largement dispersés comme une offre publique.
Bien que la loi turque ne fixe pas de limite numérique explicite au nombre d’investisseurs dans un placement privé, le processus implique intrinsèquement un groupe limité et identifiable de bénéficiaires connus de la société, plutôt qu’une large sollicitation auprès du marché général.
b. Le plafond d'émission lié aux actions
Un autre facteur critique pour les sociétés non cotées, y compris les startups, est la limite d'émission liée aux capitaux propres de l'émetteur. Le montant nominal total de tous les titres de créance en circulation (catégorie qui inclut les obligations convertibles) émis par une société privée ne peut excéder trois fois ses capitaux propres. Ce montant est déterminé à partir des derniers états financiers audités de la société.
Cette règle peut avoir des implications pratiques importantes, notamment pour les startups turques en phase de démarrage, dont le capital libéré est modeste ou qui accumulent des pertes. Des fonds propres faibles, voire négatifs, pourraient limiter considérablement le montant de la dette, y compris les obligations convertibles, qu'une startup est légalement autorisée à émettre. Par conséquent, certaines startups pourraient estimer nécessaire d'obtenir une injection initiale de fonds propres pour consolider leur bilan avant de procéder à une émission significative d'obligations convertibles.
c. Dématérialisation obligatoire et enregistrement MKK
La forme et l'enregistrement des obligations convertibles sont également strictement réglementés en Turquie. Qu'ils soient émis publiquement ou non, tous les instruments de dette créés en Turquie doivent être dématérialisés. Ce processus est géré de manière centralisée par l'Agence centrale d'enregistrement (MKK), dépositaire central des titres en Turquie.
En pratique, cela signifie qu'aucun certificat d'obligation physique n'est émis. Les obligations existent uniquement sous forme électronique, créditées sur le compte de l'investisseur concerné dans le système MKK. De plus, ces obligations dématérialisées doivent être émises sous forme nominative, c'est-à-dire officiellement enregistrées par la MKK au nom du détenteur de l'obligation. Les startups émettant des obligations convertibles doivent se conformer aux procédures de la MKK, qui incluent l'ouverture d'un compte émetteur auprès de l'agence. Cette étape est obligatoire pour la validité juridique des obligations.
IV. Conclusion
Les obligations convertibles constituent une voie d'accès distincte et potentiellement avantageuse, bien que réglementée, pour les startups turques cherchant à obtenir des investissements. La procédure d'émission d'obligations convertibles en Turquie est clairement définie par le communiqué n° VII-128.8, sous l'autorité de la CMB. Ce cadre détaille les conditions spécifiques que les startups privées doivent respecter, couvrant des aspects allant du profil des investisseurs et des limites d'émission liées aux capitaux propres de l'entreprise à la dématérialisation obligatoire des obligations via le MKK. Cette réglementation, tout en ajoutant des étapes de procédure nécessaires, vise à garantir la transparence et à protéger les intérêts de toutes les parties concernées.
Utiliser avec succès les obligations convertibles comme outil de financement ne se limite pas à comprendre leurs avantages potentiels ; cela exige une attention particulière aux exigences légales et réglementaires en vigueur. Le respect des dispositions du communiqué n° VII-128.8 et des dispositions pertinentes du Code de commerce turc n'est pas une simple formalité, mais la pierre angulaire d'une stratégie de financement solide. Pour les startups turques et leurs investisseurs, une obligation convertible soigneusement structurée, conforme à toutes les règles applicables, peut constituer une base solide pour la croissance et la collaboration futures.
Toutefois, les entreprises souhaitant recourir à cet instrument de financement doivent évaluer soigneusement, dès le départ, le cadre juridique dans lequel elles le mettront en œuvre. Le mécanisme d'augmentation de capital conditionnelle prévu par le Code de commerce turc n° 6102 s'impose comme une méthode privilégiée en raison des garanties juridiques qu'il offre. D'autres méthodes, telles que le système de capital social, le transfert d'actions propres détenues par la société aux obligataires ou les accords de préemption/cession contractuelle conclus avec les actionnaires existants, peuvent également constituer des alternatives.
À ce stade, chaque méthode peut avoir des implications différentes selon le type d'entreprise, la structure du capital, les relations avec les investisseurs, les conditions de liquidité et la composition de l'actionnariat. Il est donc crucial de faire un choix stratégique en fonction de la structure actuelle et future de l'entreprise.
Dans ce parcours de financement complexe mais potentiellement précieux, l’évaluation de la faisabilité de cet instrument dans le cadre des exigences légales, l’établissement d’un mécanisme de mise en œuvre complet qui prend également en compte ses impacts à long terme et la réalisation de préparatifs approfondis en conséquence sont essentiels pour utiliser efficacement cette option de financement.