Accords d'options sur actions en Turquie : cadre juridique et incertitudes pratiques
I. Introduction
Permettre aux employés de détenir des actions de l'entreprise et signer des accords d'options d'achat d'actions à cette fin est devenu une méthode efficace pour renforcer la fidélité des employés et encourager la performance. Bien que différents types d'accords d'options d'achat d'actions soient fréquemment utilisés dans la pratique pour atteindre cet objectif, l'absence de réglementations légales et de limitations dans la pratique en vertu du droit turc pose des défis importants aux entreprises dans la mise en place de plans d'actionnariat pour les employés.
Cet article fournit une analyse des méthodes qui peuvent être employées pour accorder aux salariés une véritable propriété d'actions dans le cadre de la Code de commerce turc n° 6102 (Le "TCC") pour sociétés par actions privées et aborde les considérations clés dans la mise en œuvre de ces méthodes.
II. Méthodes applicables en vertu du TCC pour les accords d'options d'achat d'actions
Le TCC propose différentes méthodes pouvant servir de base juridique aux accords d'options d'achat d'actions permettant aux sociétés anonymes privées d'offrir aux salariés une véritable propriété d'actions. Il s'agit notamment de l'engagement de capital, de l'augmentation de capital conditionnelle et du transfert des propres actions de la société aux salariés. Chaque méthode a ses propres principes fondamentaux et considérations juridiques.
a. Augmentation de capital par engagement de capital
- Dans cette méthode, la société augmente généralement son capital par le biais d'une résolution de l'assemblée générale, émet de nouvelles actions et attribue ces actions aux employés conformément au plan d'options d'achat d'actions. Cela implique d'augmenter le capital de la société en limitant ou en renonçant aux droits de préemption des actionnaires existants d'attribuer de nouvelles actions aux employés.
- Dans tous les cas où les droits de préemption sont restreints, le « principe de nécessité » doit être pris en compte. Pour déterminer la nécessité, il faut évaluer si des alternatives équivalentes ou plus appropriées sont disponibles. Si l’octroi d’actions aux employés n’est pas essentiel pour améliorer la loyauté et la productivité et que ces objectifs peuvent être atteints grâce à d’autres avantages financiers, ces alternatives doivent être prioritaires. En outre, les principes d’« égalité de traitement » et de « proportionnalité » doivent également être pris en compte.
- Pour faciliter l'acquisition de nouvelles actions par les salariés, il est souvent prévu que les nouvelles actions soient émises sans prime et acquises à leur valeur nominale. Cependant, comme pour toute augmentation de capital, la nécessité d'émettre des actions avec prime doit être évaluée au cas par cas. L'entreprise peut également apporter un soutien financier aux salariés (dans le respect des dispositions du TCC sur les fonds de réserve) pour l'acquisition d'actions.
- Pour adopter cette méthode, le capital existant de la société doit être entièrement libéré avant l'augmentation de capital.
- Si le bilan contient des fonds qui peuvent être ajoutés au capital en vertu de la législation, ces fonds doivent d'abord être convertis en capital. Dans certains cas, l'augmentation de capital peut être réalisée simultanément à la conversion de ces fonds en capital.
- Au moins 25 % de la valeur nominale des actions souscrites en numéraire doivent être payées avant l'enregistrement, le solde étant payable dans les 24 mois suivant l'enregistrement. Dans le cas où les actions sont émises avec une prime, la prime doit être entièrement payée avant l'enregistrement.
- Lorsque cette méthode est adoptée (bien que la structure de chaque accord d'option d'achat d'actions puisse différer), il peut être nécessaire d'augmenter le capital par une résolution de l'assemblée générale chaque fois que les salariés souhaitent exercer leurs droits d'acquisition d'actions.
b. Augmentation de capital conditionnelle
- Le Code civil prévoit des augmentations de capital conditionnelles pour donner aux salariés le droit d'acquérir des actions. Pour appliquer cette méthode, les statuts doivent prévoir une disposition spécifique. Cette disposition doit préciser la valeur nominale du capital augmenté sous condition, le nombre, la valeur et les types d'actions, les groupes habilités à exercer des droits de conversion ou d'acquisition, la suppression des droits de préemption des actionnaires existants, les privilèges accordés à certains groupes d'actions et les limitations au transfert de nouvelles actions nominatives.
- Dans cette méthode, il suffit d'avoir une disposition statutaire prévoyant une augmentation conditionnelle du capital, et il n'est pas nécessaire de prendre une décision de l'assemblée générale sur l'augmentation du capital. Le capital augmente automatiquement lorsque les droits d'acquisition ou de conversion sont exercés et que l'obligation de capital est remplie par compensation ou paiement. L'exécution des obligations est effectuée par l'intermédiaire d'une banque de dépôt ou de participation.
- En ce qui concerne les augmentations de capital conditionnelles, les actionnaires existants ont le droit de se voir offrir la possibilité de participer à l'augmentation de capital. Toutefois, comme indiqué dans le préambule de l'article pertinent du TCC, ce droit ne s'applique pas lorsque les actions sont attribuées aux salariés.
- Alors que la législation pertinente exige explicitement l’élaboration de programmes d’acquisition d’actions pour les augmentations de capital conditionnelles dans les sociétés cotées en bourse, le TCC n’impose aucune exigence de ce type pour les sociétés privées. Néanmoins, comme pour toutes les méthodes, il est essentiel de préparer et de distribuer les options d’acquisition d’actions dans le cadre d’un plan basé sur des critères objectifs, en adhérant aux principes mentionnés précédemment.
- Il convient de noter que la valeur nominale du capital augmenté conditionnellement ne peut excéder la moitié du capital existant. Les versements doivent être au moins égaux à la valeur nominale.
- Bien que les statuts imposent des restrictions au transfert d'actions, des dispositions supplémentaires peuvent être nécessaires pour traiter spécifiquement du transfert de nouvelles actions nominatives émises dans le cadre d'une augmentation de capital conditionnelle. Les restrictions existantes pour les actionnaires actuels peuvent également devoir être révisées pour assurer la cohérence avec les accords d'options d'achat d'actions pour les salariés.
c. Acquisition d'actions propres de la Société
- Il est établi qu'une société peut acquérir ses propres actions à titre onéreux ou gratuit. Les deux types d'acquisition sont soumis à des conditions différentes.
- Acquisition à titre onéreux : La valeur nominale des actions acquises par la société ne peut excéder 10 % de son capital. Après déduction de la valeur des actions acquises, l'actif net de la société ne doit pas être inférieur à la somme de son capital et des réserves légales. La contrepartie des actions à acquérir doit être entièrement libérée. En outre, l'assemblée générale doit autoriser le conseil d'administration à procéder à l'acquisition. Si toutes les conditions du TCC sont remplies, la société n'est pas tenue de céder les actions qu'elle acquiert.
- Acquisition sans contrepartie : En cas d'acquisition à titre gratuit, le prix des actions à acquérir par la société doit avoir été payé d'avance. De plus, les actions dépassant la limite de 10% doivent être cédées dans les meilleurs délais et dans un délai de 3 ans, à condition qu'il n'y ait pas de perte pour la société.
- Il n'existe pas de dispositions particulières ou exceptionnelles dans la législation concernant l'acquisition de ses propres actions par une société pour les attribuer à ses salariés. Par conséquent, les sociétés qui entendent adopter cette méthode doivent se conformer aux dispositions pertinentes du TCC.
III. Considérations clés dans la structuration des accords d'options d'achat d'actions
Les accords d'options d'achat d'actions qui accordent réellement des actions aux salariés ne servent pas seulement à renforcer la motivation des salariés, mais ont également des répercussions importantes sur la structure de l'actionnariat de l'entreprise, les processus d'investissement et les mécanismes de prise de décision de l'entreprise. Cette section décrit les principales considérations à prendre en compte avant de mettre en œuvre de telles méthodes et avant de rédiger des accords d'options d'achat d'actions.
L'augmentation du nombre d'actionnaires peut créer certains défis pour les entreprises qui envisagent de rechercher des investissements à l'avenir. Par exemple, cette situation peut dissuader certains types d'investisseurs d'investir dans l'entreprise ou compliquer les processus de négociation lors des étapes d'investissement. Bien que ces défis puissent sembler pouvoir être résolus par des conventions d'actionnaires et/ou des accords d'options d'achat d'actions (par exemple, avec l'ajout de dispositions telles que des droits de sortie conjointe), la fonctionnalité de ces mécanismes est souvent sujette à débat.
En effet, l'aspect droit du travail des conventions à signer avec les salariés ne doit pas être négligé, et les clauses relatives aux transferts d'actions, tout comme les clauses de résiliation, doivent également être évaluées sous l'angle du droit du travail et rédigées en conséquence (par exemple, en considérant des questions telles que la révocation des droits accordés, les modifications unilatérales, etc.).
Les employés auront inévitablement un impact sur les activités de l'entreprise. Bien que les actionnaires existants (fondateurs/investisseurs) puissent bénéficier de privilèges pour accroître leur pouvoir de contrôle sur les employés qui détiennent des actions, les sociétés privées ne peuvent pas émettre d'actions sans droit de vote. Par conséquent, les employés, comme les actionnaires existants, auront le droit de participer à l'assemblée générale de l'entreprise.
Dans certains cas, si les salariés n'assistent pas aux assemblées en personne ou par procuration, il peut être impossible de tenir des assemblées générales sans convocation des actionnaires. De plus, les décisions exigeant l'unanimité peuvent ne pas être prises sans la participation des salariés.
Les salariés bénéficieront également d'un droit de préemption. A moins qu'ils n'y renoncent ou qu'il n'existe une restriction justifiée à leur droit de préemption, l'entreprise ne pourra pas empêcher les salariés d'acquérir de nouvelles actions. De telles situations pourraient perturber la structure actionnariale initialement prévue par l'entreprise. Dans la mesure où les salariés, en tant qu'actionnaires, acquerront des droits tels que celui d'engager des poursuites en annulation des décisions de l'assemblée générale ou de faire valoir leur responsabilité contre les administrateurs, ils pourraient potentiellement influencer les processus décisionnels de l'entreprise en exerçant ces droits.
Si les salariés détiennent des parts minoritaires, ils peuvent empêcher l'approbation des règlements et des décharges des administrateurs et des commissaires aux comptes s'ils s'y opposent lors de l'assemblée générale. La discussion des états financiers et des questions connexes (telles que l'élection du conseil d'administration, la décharge du conseil d'administration, la détermination de la rémunération des administrateurs, la répartition des bénéfices, etc.) peut être reportée d'un mois sur décision du président de l'assemblée, à la demande des salariés. De tels scénarios pourraient ralentir les opérations de l'entreprise.
En outre, il ne sera pas possible de restreindre ou de limiter de manière absolue le transfert des actions nominatives attribuées aux salariés. Les restrictions aux transferts d'actions prévues dans les statuts ne s'appliqueront que si le refus d'approbation est justifié par des raisons liées au domaine d'activité de la société ou à l'indépendance économique de l'entreprise.
Si l'on souhaite imposer des restrictions supplémentaires au transfert d'actions au-delà de celles prévues par le TCC par le biais de dispositions dans les statuts, des droits contractuels (tels que le droit de préemption) en faveur d'un groupe d'actions spécifique peuvent être établis dans les accords pertinents. Cependant, si les employés transfèrent leurs actions en violation de ces accords, cela entraînera une obligation de payer des dommages et intérêts de la part des employés, mais l'inscription du nouvel actionnaire dans le registre des actions ne peut être empêchée.
IV. Conclusion
Il faut reconnaître que dans le contexte économique actuel, l'octroi d'actions aux salariés apparaît comme l'un des outils les plus efficaces pour retenir la main-d'œuvre qualifiée, améliorer la performance et favoriser la loyauté. Toutefois, les entreprises doivent évaluer soigneusement le cadre juridique et la compatibilité de ces méthodes avec leurs objectifs stratégiques futurs avant de rédiger des accords d'options d'achat d'actions. Lors de cette évaluation, les coûts juridiques et administratifs ainsi que les défis de mise en œuvre de chaque méthode doivent également être pris en considération. Les décisions commerciales prises sans évaluation détaillée peuvent entraîner des pertes de droits imprévues pour les employeurs et, par conséquent, pour les salariés.